Françoise Tomeno

Françoise Tomeno

14 janvier 2013

Dans la salle s'attente

Françoise Tomeno
14 janvier 2013

Une salle d'attente ressemblant à n'importe quelle salle d'attente. Plutôt des femmes. En prévision d'une possible longue attente, j'ai apporté un gros bouquin prêté par un ami: "Les douze chaises, par ILF et PETRON ". Ilf et Petron, deux auteurs russes, sans gloire, co-auteurs de cette petite merveille parue en URSS en 1928. Critique drôle et drôle de critique des débuts de l'époque stalinienne, thriller où les absurdités tant administratives qu'idéologiques sont dénoncées au travers de l'expérience qu'en font les "héros", expérience présentée de façon désopilante.

Dieu sait pourquoi, à un moment, je lève le nez. Me revient alors en mémoire une répétition d'un spectacle Raymond Queneau avec le groupe des Accroche-Coeur. Marie, notre metteur en scène de l'époque, avait pris le parti de nous faire travailler de façon Oulipienne, Raymond Queneau oblige. Elle avait écrit sur des petits papiers le titre des poèmes retenus pour le spectacle, et sur une autre série de petits papiers, des contraintes à la mode de l'Oulipo. Ce jour-là, nous tirons au sort le texte, "Un poème", et la contrainte, "Dans une salle d'attente de médecin". Nous voilà tous les quatre , Emmanuelle, Jean-Pierre, Jean-Michel et moi-même, assis en rang d'oignons, comme dans la salle d'attente aujourd'hui. La contrainte veut que l'on ne sache pas lequel d'entre nous va démarrer, c'est à dire rompre l'ambiance habituelle de la salle d'attente et envoyer le poème aux patients qui patientent. Nous l'avons fait plusieurs fois, c'était drôle et difficile, la tension montait au fur et à mesure que le temps s'écoulait avant que l'un d'entre nous ne se lance et essaie de choisir un style pour faire irruption.

Ce souvenir me fait sourire, et penser à d'autres façons d'apporter de la fantaisie dans des lieux qui n'ont pas été faits pour ça. Aujourd'hui, certaines flashmobs sont de ce style-là  et je ne résiste pas au plaisir de vous transmettre les liens conduisant à deux d'entre elles, belles par le parti pris qu'elles ont choisi. Elles se sont déroulées  l'une et l'autre en Espagne. l'une dans une agence pour l'emploi, l'autre dans une banque.



Bon voyage au pays des flashmobs...

12 janvier 2013

Le banc d'Agathe

Françoise Tomeno
14 janvier 2013

Il fait un très beau temps, et ça circule, sur le trajet de la balade; dans quelques heures, ça ressemblera à une autoroute.... 
J'aperçois sur un banc, un peu plus loin, une femme, avec, à ses pieds, une sorte de gros nounours à poils longs. Je vois que les passants qui passent s'arrêtent tous et disent quelques mots. En m'approchant, je suis sous le charme, comme ceux qui sont passés avant moi. Sans même réfléchir, j'adresse quelques mots à cette femme: "C'est agréable de vous voir là comme ça". 
Alors elle évoque, plus qu'elle ne raconte. L'animal s'appelle Agathe. Agathe venait là, avec son maître, qui s'asseyait sur ce banc. Aujourd'hui, elle, la femme, conduit Agathe jusque là. 
Je les trouve belles, toutes les deux, ensoleillées. Elles sont en paix.

Je poursuis ma balade, de bonne humeur dans ce temps de soleil. Je décide de rentrer par un autre chemin, celui qui passe dans l'île. Enfin, ce qu'on appelle l'île. Ce n'en est pas vraiment une, mais on l'appelle comme ça. J'aime ces petites rues aux bicoques inattendues, naïves, décorées, aux petits jardins qui offrent eux aussi leur naïveté et leurs inattendus. Sur le trajet, je découvre des arbres, des saules, qui ont déjà des chatons. Le printemps s'annonce. Il est précoce; d'habitude, les premiers chatons apparaissent en février. Mais quand le printemps s'annonce, on ne chipote pas....


01 janvier 2013

Métro Belleville, 31 décembre, 15 heures.

Françoise Tomeno
1er janvier 2013

Métro Belleville, 31 décembre, 15 heures.
Lorsque nous arrivons sur le quai, il y a de l'animation. Quatre hommes quelque peu éméchés jouent. Oui, jouent. Un jeu entre le jeu de billes et la pétanque. Le cochonnet est représenté par un petit objet métallique de forme improbable. Ces messieurs visent cet objet avec des briquets, un blanc, un noir, un jaune, un vert.

Nous nous arrêtons le temps de laisser passer un briquet. Amusés, nous avançons un peu sur le quai, au delà de l'aire de jeu. Soudain j'entends: "Le black, il y arrive pas avec la couleur". Je me retourne, l'un d'eux, personne "de couleur" comme l'on dit, "black", en effet, vient de perdre en lançant un briquet jaune. Ils sont tous les quatre pliés de rire, et ont du mal à s'en remettre. 

La partie continue, sous l'oeil amusé de toutes les personnes présentes sur le quai. Celles qui arrivent attendent de pouvoir passer, sans interrompre la partie. Du jamais vu dans le métro. Nous sommes le 31 décembre: chacun a du temps, sans doute, et peut faire place aux autres, au jeu, à l'amusement. 

Ils sont habiles, ces messieurs: tout éméchés qu'ils sont, ils réussissent parfois de jolis coups.

À un moment, le "black" lance le briquet vert: gagné! Il a réussi à faire gicler deux briquets auprès du cochonnet. Il exulte, jubile, manifeste avec de grands rires sa joie, danse, suivi de ses potes, qui viennent lui taper sur l'épaule, le dos, dansent avec lui, contents pour lui, contents sans doute que cette fois-ci, le black, il ait réussi avec "sa couleur".

Luciole de ce 31 décembre.